Saint-Denis, mercredi. La Briche rassemble une soixantaine d'artistes et artisans sur le site d’une ancienne usine de récupération de métaux. LP/F.NI.
A l’entrée, une grande enseigne en fer forgé annonce le début du voyage. Nichée entre les voies ferrées et le canal, à quelques minutes à pied de la gare de Saint-Denis, La Briche est un monde à part. Une aventure inattendue dans une zone urbaine depuis longtemps délaissée. « C’est une faille spatio-temporelle », résume joliment l’une des locataires des lieux.
Ils sont une soixantaine d’artistes, artisans et créateurs rassemblés sur l’ancien complexe de récupération de métaux. L’activité industrielle a cessé dans les années 1970, mais l’âme est restée. Une dizaine d’ateliers sont aujourd’hui répartis entre les bâtiments de l’usine, au fond de ce site de 2ha, et les maisons en pierre meulière bordant une grande cour où des jardins ont poussé. S’y croisent en permanence des sculpteurs, des illustrateurs, des costumiers, des constructeurs de décors, mais aussi une architecte, un coutelier, un metteur en scène et même une marionnettiste.
La plupart vit à Saint-Denis. Une poignée seulement a élu domicile sur la friche. Nicolas Cesbron est de ceux-là. Ancien Normalien et agrégé de mécanique, il a plaqué sa carrière d’enseignant-chercheur pour devenir « sculpteur de mobilier fantastique ». Sur le site depuis 1995, il fait partie des plus anciens, les « Brichecards ». La nouvelle génération, les « Brichous », a suivi bien plus tard. « L’esprit de liberté des débuts est toujours là », se réjouit le doyen.
Ses créations oniriques colonisent l’ancien cœur battant de l’usine, le « casse fonte », une « machine à casser les machines » citée au patrimoine industriel du département. A l’arrière, un potager et une petite ferme peuplée de poules, de chèvres et du cochon mascotte, Tagada, donnent une touche bucolique au monstre endormi. Et offrent un début d’indépendance alimentaire à la Briche, où une minuscule épicerie bio autogérée a ouvert depuis un an.
L’indépendance, c’est le maître mot de tous ceux qui y travaillent quotidiennement. Un contrat de location les lie au propriétaire, en attendant de pouvoir peut-être demain racheter le terrain. Mais il n’y a ici pas de charte, pas de règlement. Seulement de la « bienveillance » et de « l’émulation ». « On travaille souvent en équipe, on partage nos connaissances et le matériel, on se refile des plans », confirme Carla Chassang, en s’affairant sur une étrange sculpture.
Comme beaucoup de Brichous, la jeune femme est issue de l’école parisienne d’arts appliqués Olivier de Serres. Pour s’immiscer dans le cocon, elle s’est appuyée sur son réseau de copains. « La Briche, c’est la famille », sourient Emilie et Polsy, qui ont le même parcours. David Tellier a lui dû frapper à la porte plusieurs fois avant de pouvoir installer ses outils de rémouleur et sa petite forge au sein du « Ratelier ». « Il y a une grosse énergie ici, des gens qui foncent », se félicite le quadragénaire.
Cette énergie, le grand public en a chaque année un aperçu lors de la « Briche foraine », une grande fête gratuite organisée au printemps. Elle n’aura pas lieu en 2017. « On fait une petite pause, mais l’an prochain, elle sera géniale », promet déjà Jean-Mathieu, le metteur en scène.
leparisien.fr
Série Friches d'artistes : la Briche, une " faille spatio-temporelle " à Saint-Denis
A l'entrée, une grande enseigne en fer forgé annonce le début du voyage. Nichée entre les voies ferrées et le canal, à quelques minutes à pied de la gare de Saint-Denis, La Briche est un mon...